Publisher's Synopsis
La montée brutale de la Chine est, en termes de rapport de force, l'évolution tectonique la plus rapide de tous les temps. Si les États-Unis étaient une grande entreprise, ils auraient représenté à eux seuls 50 % du marché économique mondial dans les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. En 1980, cette part est tombée à 22 %. Après trois décennies de croissance chinoise à deux chiffres, elle tourne désormais autour de 16%. Si la tendance actuelle se poursuit, la part des États-Unis dans la production mondiale continuera de baisser au cours des trois prochaines décennies pour s'établir à seulement 11 %. Sur la même période, la part de la Chine dans l'économie mondiale, qui est passée de 2 % en 1908 à 18 % en 2016, devrait atteindre 30 % en 2040.
Le développement économique de la Chine fait de ce pays un redoutable concurrent politique et militaire. Pendant la guerre froide, quand les États-Unis multipliaient les réactions maladroites aux provocations soviétiques, on pouvait lire sur une pancarte collée au Pentagone: Qu'un ennemi sérieux surgisse, et ce sera la catastrophe. Mais la Chine est un ennemi potentiel très sérieux.
Que les États-Unis et la Chine se fassent jamais la guerre semble à la fois improbable et déraisonnable. Mais les centenaires qui ont vécu la Première Guerre mondiale sont là pour nous rappeler que la déraison est caractéristique de l'homme. En disant que la guerre est inconcevable, parlons-nous de ce qui est réellement possible dans le monde ou de ce que nos esprits limités sont capables de concevoir ?
En ce qui concerne l'avenir, la grande question d'ordre mondial est: la Chine et les Etats-Unis peuvent-ils échapper au piège de Thucydide ? Presque chaque fois qu'une telle question s'est posée dans l'histoire, les choses ont mal tourné. Seize fois au cours des cinq derniers siècles, une puissance montante a menacé de supplanter la grande puissance régnante. Dans douze cas, cette situation s'est terminée par la guerre. Quant aux quatre fois où la guerre a été évitée, cela n'a été possible que grâce à des ajustements majeurs, de part et d'autre, dans les actions et les attitudes.
Les États-Unis et la Chine peuvent également éviter la guerre, à condition d'intérioriser deux vérités difficiles. Premièrement, s'ils maintiennent leur cap actuel, la guerre entre les États-Unis et la Chine dans les décennies à venir est non seulement possible, mais bien plus probable que nous ne voudrions l'admettre. En fait, historiquement, la guerre reste l'issue la plus probable. De plus, on ne fait qu'aggraver le risque en sous-estimant le danger. Si les responsables à Pékin et à Washington continuent d'agir comme ils l'ont fait au cours de la dernière décennie, il est presque certain que la Chine et les États-Unis finiront par entrer en guerre. Deuxièmement, la guerre n'est pas inévitable. L'histoire montre que les grandes puissances dominantes savent gérer leurs relations avec leurs rivaux (même ceux qui menacent de les supplanter) sans déclencher une guerre. L'examen de ces réussites, comme celui des échecs, recèle plus d'une leçon utile pour les chefs d'État d'aujourd'hui. Comme l'a souligné George Santayana, seuls ceux qui n'apprennent rien de l'histoire sont condamnés à la répéter.